Epilogue V4 - Oui à ce qui est.

Publié le par Mélanie

                              Le Camino comme métaphore de la Voie est assurément un chemin d'Acceptation. De la souffrance physique, du poids du sac, des humeurs et baisses de régime, de la météo, des personnes rencontrées,... Quand on a décidé d'arriver au terme du voyage, tout appèle l'acceptation pour une réponse appropriée, ajustée dans un second temps. Sans quoi, on en revient en disant : nuncamais!
J'aurais préféré l'avoir écrit moi-même et aussi c'est un peu long comme conclusion -surtout tapé avec deux doigts- mais ça me parle.

                              Dans le chapitre qui a trait à l'Acceptation du livre d'Arnaud Desjardins précédemment cité, Arnaud écrit que "l'acceptation de ce qui est" est commune au taoïsme, au boudhisme, au chritianisme. Généralement mal compris, cela correspond à ce qu'on appelait autrefois, la soumission à la volonté de Dieu. Le mot Islam lui-même signifie soumission. Les hindous parlent de "complete surrender to god's will", reddition complète à la volonté de Dieu. LA VOLONTE DE DIEU C'EST CE QUI SE PRODUIT A CHAQUE INSTANT, C'EST TOUT. De même, la parole du Christ "que ton oui soit un oui et que ton non soit un non" se traduit aussi par "Dis c'est, c'est, ce n'est pas, ce n'est pas car tout le reste vient du malin". Un maître hindou dira "It is".  Tout le reste vient du mental, et par lui chacun se met à chérir des opinions, à vivre dans son monde au lieu de vivre dans le monde. A partir de "ce qui est d'instant en instant", nous pouvons AGIR.
Swami Prajnanpad dit : NOT WHAT SHOULD BE BUT WHAT IS et NO DENIAL. Y compris s'il s'agit d'événements que notre conscience ordinaire considère comme intolérables, bouleversants, dramatiques, inacceptables.
Le mental c'est le denial (le déni : tenter d'affirmer que ce qui est n'est pas). Toujours autre chose que ce qui est : ça devrait être, ça ne devrait pas être. L'acceptation c'est la reconnaissance de ce qui est. See and recognize. Voyez et reconnaissez que ce qui est, est.
Exemple d'Arnaud (rien à voir a priori avec le Camino) : J'entre dans ma salle de bain, je m'aperçois qu'elle est inondée car les robinets sont ouverts et la baignoire  a débordé. Je me souviens que je n'ai pas contracté d'assurance pour le dégât des eaux. Tout ça ce sont des faits qui doivent être totalement, à 100% acceptés. Par contre cela ne peut pas être toléré et immédiatement, je ferme les robinets. L'acceptation ne consiste pas à laisser les robinets ouverts. L'acceptation n'empêche pas d'agir.

Swamiji disait aussi : "Tout ce qui vous arrive vous correspond ; c'est votre destin, c'est votre karma, d'un certain point de vue, vous l'avez attiré", Your being attracts your life", et encore "Tout ce qui vous arrive vous arrive comme un défi et une opportunité".
Le but est de pouvoir atteindre l'acceptation permanente, un OUI permanent qui représente la disparition du mental et l'adhésion totale, d'instant en instant, de nous-même avec ce qui arrive, c'est à dire la coïncidence parfaite de notre monde avec le monde. Si le mot acceptation fait peur, le remplacer par "see and recognize" ou "adhésion" ou "to be one with". "Etre un avec" est le strict contraire d'"être emporté par".

                                             "Le chemin n'est possible que d'instant en instant, ici et maintenant, comme vous l'avez lu partout, juste ici et juste maintenant. Je ne peux pas avoir d'autres points d'appui. Pour reprendre la comparaison du voyage en Inde par la route (...), tout le chemin se fait de cinq centimètres en cinq centimètres, c'est à dire les cinq centimètres par lesquels le pneu appuie sur la route. (...) de la même façon, le chemin qui va de l'irréel au réel, du non-vrai au vrai et de la mort à l'immortalité, se fait de cinq centimètres en cinq centimètres, de cinq secondes en cinq secondes, d'une seconde en une seconde, en prenant appui sur l'instant vécu.
A partir de maintenant tout est le chemin, et chaque fois que je décroche de ce qui est, c'est comme si la voiture dérapait ou patinait, que les roues n'adhéraient plus à la route. La voiture ne continue pas à progresser. C'est dans cette adhésion à la réalité que je fais le chemin comme la voiture adhère à la route. Nous voulons des pneus qui adhèrent à la route pour pouvoir avancer, et nous, nous devons adhérer à la réalité pour pouvoir avancer aussi.
Quand nous patinons, nous continuons d'exister, c'est à dire, que nous nous marions, nous divorçons, nous allons au restaurant, nous concluons nos affaires, mais nous ne progressons plus sur le chemin qui va du sommeil à l'éveil, de l'ignorance à la connaissance, de la multiplicité à l'unité, de l'inquiétude et du conflit à la paix et à la sérénité.
De seconde en seconde.
La seconde est faite de ce qui est là. (...)".




Publié dans Pour finir

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J
Et encore Madeleine Delbrêl, avec ses "supérieures fidèles" : Nous autres gens de la rue, nous savons très bien que tant que notre volonté sera vivante nous ne pourrons pas aimer pour de bon le Christ. Nous savons que seule l’obéissance pourra nous établir dans cette mort. Nous envierions nos frères religieux si nous ne pouvions, nous aussi, mourir un peu plus à chaque minute.<br /> Les menues circonstances sont des «supérieures» fidèles. Elles ne nous laissent pas un instant et les « oui »que nous devons leur dire succèdent les uns aux autres. Quand on se livre à elles sans résistance, on se trouve merveilleusement libéré de soi-même. On flotte dans la Providence comme un bouchon de liège dans l’eau. Et ne faisons pas les fiers : Dieu ne confie rien à l’aventure; les pulsations de notre vie sont immenses, car il les a toutes voulues.<br /> Dès le réveil, elles nous saisissent. C’est la sonnerie du téléphone. C’est la clé qui tourne mal. C’est l’autobus qui n’arrive pas, qui est complet, ou qui ne nous attend pas. C’est notre voisin de banquette qui tient toute la place; ou la glace qui vibre à nous casser la tête.<br /> C’est l’engrenage de la journée, telle démarche qui en appelle une autre, tel travail que nous n’aurions pas choisi. C’est le temps et ses variations exquises parce que absolument pures de toute volonté humaine. C’est avoir froid ou c’est avoir chaud, c’est la migraine et c’est le mal aux dents ; ce sont les gens que l’on rencontre. Ce sont les conversations que nos interlocuteurs choisissent. C’est le monsieur mal élevé ii nous bouscule sur le trottoir; ce sont les gens qui ont envie de perdre du temps et qui nous happent.<br /> L’obéissance, pour nous, gens de la rue, c’est encore de nous plier aux manies de notre époque quand elles sont sans malice. C’est d’avoir le costume de tout le monde, les habitudes de tout le monde, le langage de tout le monde.<br /> C’est, lorsque l’on vit à plusieurs, d’oublier d’avoir un goût et de laisser les choses à la place que les autres leur donnent. La vie devient ainsi une sorte de grand film au ralenti. Elle ne nous essouffle pas. Elle ronge petit à petit, fibre par fibre, la trame du vieil homme, qui n’est pas raccommodable et qu’il faut totalement renouveler. Quand nous nous sommes accoutumés à livrer ainsi notre volonté au gré de tant de minuscules choses, nous ne trouvons pas plus difficile, quand l’occasion s’en présente, de faire la volonté de notre chef de service, de notre mari ou de nos parents. <br /> Et nous espérons bien que la mort même sera facile. Elle ne sera pas une grande chose, mais une suite de petites souffrances ordinaires l’une après l’autre consenties.
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